La nature
À Aurore
La nature est tout ce qu’on voit,
Tout ce qu’on veut, tout ce qu’on aime.
Tout ce qu’on sait, tout ce qu’on croit,
Tout ce que l’on sent en soi-même.
Elle est belle pour qui la voit,
Elle est bonne à celui qui l’aime,
Elle est juste quand on y croit
Et qu’on la respecte en soi-même.
Regarde le ciel, il te voit,
Embrasse la terre, elle t’aime.
La vérité c’est ce qu’on croit
En la nature c’est toi-même.
George Sand (1804-1876)
Contes d'u
LA MER
Brise marine
La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.
Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe
Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature !
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,
Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots …
Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !
Stéphane Mallarmé (1842-1898)
Oeuvres Poétiques I
LA RIVIERE
La Rivière
D’un bord à l’autre bord j’ai passé la rivière,
Suivant à pied le pont qui la franchit d’un jet
Et mêle dans les eaux son ombre et son reflet
Au fil bleui par le savon des lavandières.J’ai marché dans le gué qui chante à sa manière.
Étoiles et cailloux sous mes pas le jonchaient.
J’allais vers le gazon, j’allais vers la forêt
Où le vent frissonnait dans sa robe légère.J’ai nagé. J’ai passé, mieux vêtu par cette eau
Que par ma propre chair et par ma propre peau.
C’était hier. Déjà l’aube et le ciel s’épousent.Et voici que mes yeux et mon corps sont pesants,
Il fait clair et j’ai soif et je cherche à présent
La fontaine qui chante au cœur d’une pelouse.
LA RIVIERE
La Rivière
D’un bord à l’autre bord j’ai passé la rivière,
Suivant à pied le pont qui la franchit d’un jet
Et mêle dans les eaux son ombre et son reflet
Au fil bleui par le savon des lavandières.J’ai marché dans le gué qui chante à sa manière.
Étoiles et cailloux sous mes pas le jonchaient.
J’allais vers le gazon, j’allais vers la forêt
Où le vent frissonnait dans sa robe légère.J’ai nagé. J’ai passé, mieux vêtu par cette eau
Que par ma propre chair et par ma propre peau.
C’était hier. Déjà l’aube et le ciel s’épousent.Et voici que mes yeux et mon corps sont pesants,
Il fait clair et j’ai soif et je cherche à présent
La fontaine qui chante au cœur d’une pelouse.
LA TRMPETE
Titre : Une tempête
Poète : Victor Hugo (1802-1885)
Recueil : Toute la lyre (1888 et 1893).
Une tempête
Approchait, et je vis, en relevant la tête,
Un grand nuage obscur posé sur l'horizon ;
Aucun tonnerre encor ne grondait ; le gazon
Frissonnait près de moi ; les branches tremblaient toutes,
Et des passants lointains se hâtaient sur les routes.
Cependant le nuage au flanc vitreux et roux
Grandissait, comme un mont qui marcherait vers nous.
On voyait dans des prés s'effarer les cavales,
Et les troupeaux bêlants fuyaient. Par intervalles,
Terreur des bois profonds, des champs silencieux,
Emplissant tout à coup tout un côté des cieux,
Une lueur sinistre, effrayante, inconnue ;
D'un sourd reflet de cuivre illuminait la nue,
Et passait, comme si, sous le souffle de Dieu,
De grands poissons de flamme aux écailles de feu,
Vastes formes dans l'ombre au hasard remuées,
En ce sombre océan de brume et de nuées
Nageaient, et dans les flots du lourd nuage noir
Se laissaient par instants vaguement entrevoir !
LES NUAGES
L'étranger
- Qui aimes-tu le mieux, homme enigmatique, dis? ton père, ta mère, ta soeur ou ton frère?
- Je n'ai ni père, ni mère, ni soeur, ni frère.
- Tes amis?
-Vous vous servez là d'une parole dont le sens m'est resté jusqu'à ce jour inconnu.
- Ta patrie?
- J'ignore sous quelle latitude elle est située.
- La beauté?
- Je l'aimerais volontiers, déesse et immortelle.
- L'or?
- Je le hais comme vous haïssez Dieu.
- Eh! qu'aimes-tu donc, extraordinaire étranger?
- J'aime les nuages... les nuages qui passent... là-bas... là-bas... les merveilleux nuages!
Baudelaire: Petits poèmes en prose, I (186
LE PHARE
Titre : Le phare
Poète : Joseph Autran (1813-1877)
Recueil : Les Poèmes de la mer (1859).
Parmi les noirs brisants où le flot tourbillonne,
Le phare vers la nue élève sa colonne.
Pilier de blocs massifs qu'unit un dur ciment,
Il surgit, solitaire, ainsi qu'un monument.
Des vagues, à ses pieds, la fureur se déchaîne :
On dirait que la mer assiège de sa haine
Cette tour qui, montrant le péril aux vaisseaux,
La frustre d'un butin convoité par ses eaux.
Le soir vient, l'horizon s'efface dans la brume :
Sur la tour, aussitôt, le fanal se rallume ;
Avant même qu'au ciel une étoile ait relui,
Un astre éclaire l'onde,- et cet astre, c'est lui !...
Foyer de vifs rayons dont la lueur éclate,
Il enflamme les airs d'une teinte écarlate ;
Et, sur l'Océan noir son reflet projeté
Semble un chemin de feu par la houle agité.
Averti des écueils dont ce bord se hérisse,
Le navire alors cherche une onde plus propice ;
Il veille à sa manœuvre, et, le long du canal,
Rend grâce en le fuyant au lumineux fanal.
Des nochers en péril ce guide manifeste
A d'autres voyageurs sera pourtant funeste.
Il en est qui par lui sont pris en trahison :
Ceux-là sont les oiseaux bercés à l'horizon,
Ce sont les passagers du vent et de la nue.
La saison froide et triste étant déjà venue,
En colonne, en triangle, ils traversaient les airs,
Cherchant au loin des cieux plus tièdes et plus clairs.
Voilà qu'au bord des flots l'ardent soleil du phare
Brille, et dans leur essor les trouble et les égare.
Eux qui des cieux profonds savent chaque sentier,
Qui firent sans erreur le tour du globe entier,
Pour la première fois suspendus par le doute,
Se laissent détourner de l'infaillible route ;
Ils veulent de plus près, dans l'ombre de la nuit,
Voir l'étrange soleil dont l'éclat les séduit.
Ainsi que dans un champ, par troupes inquiètes,
Descendent au miroir les jeunes alouettes ;
Comme le papillon, si fragile et si beau,
S'abandonne le soir à l'attrait du flambeau,
Ils viennent par essaims ; — ramiers blancs comme neige,
Pluviers, cailles, vanneaux, ils s'approchent du piège ;
Fascinés, éblouis, ils tournent ; je les vois
Autour du haut fanal voler tous à la fois.
En vain contre le charme ils voudraient se débattre ;
Dans le rayonnement de la clarté rougeâtre,
Ils sont pris de vertige... hélas ! Et tour à tour
Se brisent dans leur chute aux pierres de la tour.
Et la mer les saisit de ses promptes écumes ;
Et, flocons dispersés, le vent sème leurs plumes ;
Et le cri douloureux des blessés convulsifs
Se mêle au sourd fracas des flots dans les récifs.
Oiseaux infortunés ! Là-haut, près des nuages,
Vous poursuiviez en paix vos éternels voyages.
Conduits par un instinct si rarement déçu,
Au soleil véritable et d'avance aperçu
Vous alliez confiants : palmiers, claires fontaines,
Doux nids, vous appelaient aux régions lointaines.
Vous ne les verrez pas ; séduits par un faux jour,
Vous ne connaîtrez plus ni le ciel ni l'amour !
Hélas ! Telle est du sort la cruelle ironie :
On entrevoit de loin quelque sphère bénie ;
Plein des rêves sacrés du sage ou de l'amant,
Vers un but radieux on s'envole ardemment,
Et l'on meurt en chemin, et l'on tombe victime
D'un rayon qui vous ment et vous jette à l'abime !
L'AUTOMNE
L’automne
L’automne, au coin du bois,
Joue de l’harmonica.
Quelle joie chez les feuilles !
Elles valsent au bras
Du vent qui les emporte.
On dit qu’elles sont mortes,
Mais personne n’y croit.
L’automne, au coin du bois,
Joue de l’harmonica.
Maurice Carême
Chanson d’automne (extrait)
Déjà plus d’une feuille sèche
Parsème les gazons jaunis ;
Soir et matin, la brise est fraîche,
Hélas ! les beaux jours sont finis !
On voit s’ouvrir les fleurs que garde
Le jardin, pour dernier trésor :
Le dahlia met sa cocarde
Et le souci sa toque d’or.
La pluie au jardin fait des bulles ;
Les hirondelles sur le toit
Tiennent des conciliabules :
Voici l’hiver, voici le froid !
(…)
Théophile GAUTIER (1811-1872) Émaux et camées
L'AUTOMNE
Les feuilles d'automne
Quand le livre où s'endort chaque soir ma pensée,
Quand l'air de la maison, les soucis du foyer,
Quand le bourdonnement de la ville insensée
Où toujours on entend quelque chose crier,
Quand tous ces mille soins de misère ou de fête
Qui remplissent nos jours, cercle aride et borné,
Ont tenu trop longtemps, comme un joug sur ma tête,
Le regard de mon âme à la terre tourné ;
Elle s'échappe enfin, va, marche, et dans la plaine
Prend le même sentier qu'elle prendra demain,
Qui l'égare au hasard et toujours la ramène,
Comme un coursier prudent qui connaît le chemin.
Elle court aux forêts où dans l'ombre indécise
Flottent tant de rayons, de murmures, de voix,
Trouve la rêverie au premier arbre assise,
Et toutes deux s'en vont ensemble dans les bois !
Victor Hugo
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L'AUTOMNE
L’Automne
Sois le bienvenu, rouge Automne,
Accours dans ton riche appareil,
Embrase le coteau vermeil
Que la vigne pare et festonne.
Père, tu rempliras la tonne
Qui nous verse le doux sommeil ;
Sois le bienvenu, rouge Automne,
Accours dans ton riche appareil.
Déjà la Nymphe qui s’étonne,
Blanche de la nuque à l’orteil,
Rit aux chants ivres de soleil
Que le gai vendangeur entonne.
Sois le bienvenu, rouge Automne.
Théodore de Banville (1823-1891)
Les cariatides
Charles BAUDELAIRE
1821 - 1867
L'aube spirituelle
Entre en société de l'Idéal rongeur,
Par l'opération d'un mystère vengeur
Dans la brute assoupie un ange se réveille.
Des Cieux Spirituels l'inaccessible azur,
Pour l'homme terrassé qui rêve encore et souffre,
S'ouvre et s'enfonce avec l'attirance du gouffre.
Ainsi, chère Déesse, Être lucide et pur,
Sur les débris fumeux des stupides orgies
Ton souvenir plus clair, plus rose, plus charmant,
A mes yeux agrandis voltige incessamment.
Le soleil a noirci la flamme des bougies ;
Ainsi, toujours vainqueur, ton fantôme est pareil,
Ame resplendissante, à l'immortel soleil !
L’Automne
Sois le bienvenu, rouge Automne, Accours dans ton riche appareil, Embrase le coteau vermeil
Que la vigne pare et festonne.
Père, tu rempliras la tonne
Qui nous verse le doux sommeil ; Sois le bienvenu, rouge Automne, Accours dans ton riche appareil.
Déjà la Nymphe qui s’étonne, Blanche de la nuque à l’orteil,
Rit aux chants ivres de soleil
Que le gai vendangeur entonne. Sois le bienvenu, rouge Automne.
Théodore de Banville
L'AUTOMNE
Les feuilles d'automne
Quand le livre où s'endort chaque soir ma pensée,
Quand l'air de la maison, les soucis du foyer,
Quand le bourdonnement de la ville insensée
Où toujours on entend quelque chose crier,
Quand tous ces mille soins de misère ou de fête
Qui remplissent nos jours, cercle aride et borné,
Ont tenu trop longtemps, comme un joug sur ma tête,
Le regard de mon âme à la terre tourné ;
Elle s'échappe enfin, va, marche, et dans la plaine
Prend le même sentier qu'elle prendra demain,
Qui l'égare au hasard et toujours la ramène,
Comme un coursier prudent qui connaît le chemin.
Elle court aux forêts où dans l'ombre indécise
Flottent tant de rayons, de murmures, de voix,
Trouve la rêverie au premier arbre assise,
Et toutes deux s'en vont ensemble dans les bois !
Victor Hugo
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CASCADE
Cascade
Cascade d'hiver
Soif de solitude
Avis de recherche
D'un petit caillou
Dissimulé
Sous une robe de glace
Cascade de printemps
Chanson d'hirondelles
Naissance annoncée
Joyeusement
De l'herbe mince
Qui pousse dans l'eau
Cascade d'été
Sourire profond
Des rayons perdus
Sous les yeux
Ardents
De l'astre d'or
Cascade d'automne
Visite impromptue
Du faisan seul
Temps de réflexion
La cascade
Enfin
Livre ses réponses
Sophie Lei Thuman extrait de « Monde flottant
LA NATURE
Titre : La nature est pleine d'amour
Poète : Victor Hugo (1802-1885)
Recueil : Les chansons des rues et des bois (1865).
La nature est pleine d'amour,
Jeanne, autour de nos humbles joies ;
Et les fleurs semblent tour à tour
Se dresser pour que tu les voies.
Vive Angélique ! à bas Orgon !
L'hiver, qu'insultent nos huées,
Recule, et son profil bougon
Va s'effaçant dans les nuées.
La sérénité de nos coeurs,
Où chantent les bonheurs sans nombre,
Complète, en ces doux mois vainqueurs,
L'évanouissement de l'ombre.
Juin couvre de fleurs les sommets,
Et dit partout les mêmes choses ;
Mais est-ce qu'on se plaint jamais
De la prolixité des roses ?
L'hirondelle, sur ton front pur,
Vient si près de tes yeux fidèles
Qu'on pourrait compter dans l'azur
Toutes les plumes de ses ailes.
Ta grâce est un rayon charmant ;
Ta jeunesse, enfantine encore,
Éclaire le bleu firmament,
Et renvoie au ciel de l'aurore.
De sa ressemblance avec toi
Le lys pur sourit dans sa gloire ;
Ton âme est une urne de foi
Où la colombe voudrait boire.
La NATURE
À Aurore
La nature est tout ce qu’on voit,
Tout ce qu’on veut, tout ce qu’on aime.
Tout ce qu’on sait, tout ce qu’on croit,
Tout ce que l’on sent en soi-même.
Elle est belle pour qui la voit,
Elle est bonne à celui qui l’aime,
Elle est juste quand on y croit
Et qu’on la respecte en soi-même.
Regarde le ciel, il te voit,
Embrasse la terre, elle t’aime.
La vérité c’est ce qu’on croit
En la nature c’est toi-même.
George Sand (1804-1876)
Contes d'une grand'mère
LA MONTAGNE
BALADE EN MONTAGNE | |
Je goûte au silence du matin, Mon regard pénètre émerveillé, Je goûte à l'arôme délicat, |
ARBRE FLEURI
Anatole FRANCE
1844 - 1924
Les arbres
Animez et les champs et vos forêts natales,
Enfants silencieux des races végétales,
Beaux arbres, de rosée et de soleil nourris,
La Volupté par qui toute race animée
Est conçue et se dresse à la clarté du jour,
La mère aux flancs divins de qui sortit l'Amour,
Exhale aussi sur vous son haleine embaumée.
Fils des fleurs, vous naissez comme nous du Désir,
Et le Désir, aux jours sacrés des fleurs écloses,
Sait rassembler votre âme éparse dans les choses,
Votre âme qui se cherche et ne se peut saisir.
Et, tout enveloppés dans la sourde matière
Au limon paternel retenus par les pieds,
Vers la vie aspirant, vous la multipliez,
Sans achever de naître en votre vie entière.